Restauration versus réparation

© Pascal Chour - 2012-2017

Réparation et/ou restauration des postes de TSF ?

On assiste parfois, dans certains forums spécialisés, à des oppositions entre les tenants de la restauration (ou conservation) et les tenants de la réparation. Avant d’aller plus loin, essayons de définir ce que recouvrent ces deux approches :

La restauration/conservation vise à remettre l’appareil dans son état d’origine de façon à le préserver de la dégradation liée au temps. Il s’agit donc d’une forme de réparation mais qui n’a pas forcément un objectif fonctionnel. On admet qu’après cette restauration, le poste peut ne pas fonctionner. Un objectif de cette approche est de conserver le témoignage des techniques (conception, fabrication…) de l’époque. Même le changement d’une pièce en laiton d’un poste à galène par une pièce ré-usinée spécifiquement à l’époque présente peut poser un problème puisque il y a un risque qu’elle n’ait pas été usinée de la même façon qu’à l’origine. Or, les pièces conservent la mémoire de leur fabrication. On a donc perdu une information.

La réparation a pour objectif de remettre l’appareil dans un état fonctionnel. La réparation admet les améliorations, opérations qui étaient pratiquées à l’époque où les postes à lampes étaient effectivement utilisés. Pour un poste à lampe, il pouvait s’agir d’une amélioration du mécanisme de silencieux permettant d’éviter le bruit entre les stations (souvent semble-t-il, ce mécanisme était supprimé car générant trop de pannes). Dans les années 1970, il existait des modules permettant de transformer un récepteur de télévision 819 lignes en récepteur double standard afin de recevoir la deuxième chaine. La démarche du réparateur sera donc de changer tout ce qui doit l’être pour que l’appareil fonctionne de nouveau, soit fiable et parfois, plus performant qu’à l’origine.

Raisons du débat

Supposons que vous récupériez un poste à galène « dans son jus ». Envisagez-vous un usage quotidien de l’appareil ? Surement pas. Il s’agit d’un appareil peu sensible, uniquement conçu pour recevoir de la modulation d’amplitude qui est en voie de disparition. Imaginer transformer l’appareil pour recevoir de la modulation de fréquence avec un son amplifié n’a pas de sens. Dans ce contexte, l’objectif sera la restauration.

Le même raisonnement peut s’appliquer à un poste « batterie ».

Prenons le cas maintenant d’un poste des années 1930 jusqu’aux années 1950 conçu pour recevoir la modulation d’amplitude en grandes, moyenne et petites ondes. En 2012, il est possible d’utiliser un tel poste quotidiennement si l’on se contente de recevoir quelques stations (en France, France-inter ou équivalent, France info…). Celles-ci sont en voie de disparition (note : en 2017, c'est en partie fait, voir Décision n° 2016-875 du 7 décembre 2016). Il est néanmoins probable que dans la plupart des cas, ce type de poste ne sera pas utilisé. La restauration sera donc le choix le plus judicieux.

Finalement, le seul cas où l’on peut souhaiter utiliser quotidiennement un poste à lampes concerne les appareils fabriqués fin 1950, début 1960 en mesure de recevoir des émissions en modulation de fréquence qui représentent, en 2012, la majorité des émissions que l’on peut recevoir. Mais là encore, on doit penser que ce type de modulation a fait son temps et qu’elle sera remplacée par des émissions transmises en numérique. Néanmoins, à la date de rédaction de ce document, on peut vouloir utiliser un tel poste pour ses qualités intrinsèques : audition agréable (lampes, transformateur de sortie, haut-parleurs de grande taille), coté rétro, etc. Dans ce cas, une combinaison de restauration et de réparation est à envisager car ces appareils sont encore fonctionnels.

Enfin, il existe un cas particulier que je ne dois pas être le seul à avoir identifié : le souhait de disposer d’un poste ancien pour des raisons sentimentales mais fonctionnel pour des raisons pratiques. Pour ce qui me concerne, la réparation de tels postes peut aller jusqu’à la transformation complète de l’appareil (transplantation « cœur-poumons », cf. Ducretet L124 sur ce site) qui fera hurler les tenants de la restauration mais lorsqu’il est question de sentiments… Pour ces cas, je n’ai pas hésité à mettre une électronique moderne à l’intérieur du poste sachant néanmoins que dans tous les cas, les postes concernés n’étaient pas réparables (postes bricolés, cannibalisés, etc.).

A croire d'ailleurs que cette approche a fait des émules. Pour s'en convaincre, il faut absolument faire un tour sur ce site.

La restauration et ses limites

Dans les postes anciens, vous devez considérer deux aspects :

Il existe de nombreux sites expliquant comment redonner un coup de jeune aux boîtiers selon la matière utilisée (bois, bakélite, matières plastiques). Les boitiers bois sont les plus courants. La difficulté est d’obtenir un vernis le plus proche possible de celui d’origine. Sans être un spécialiste, il me semble que le vernis au tampon est la meilleure technique. Mais on obtient également de bon résultats avec des vernis au pinceau ou au rouleau, voir, pas de vernis du tout (huile de lin). Normalement, toutes ces méthodes son réversibles donc même si la restauration n’est pas faite selon les techniques initiales, il sera possibles pour un de vos successeurs de remettre le boitier à l’état brut et refaire la restauration. Seul problème potentiel, il sera parfois nécessaire de poncer et on ne peut pas le faire indéfiniment. Cas particulier : les boîtiers peints avec des dégradés (courants dans les années 50) pour lesquels je n’ai pas trouvé de recettes.

Pour les parties mécaniques (châssis, transmissions, blindage, autres pièces métalliques), là aussi, il existe des sites proposant des recettes mariant la chimie et l’action mécanique qui permettront de leur donner un coup de neuf. A minima, vous pouvez nettoyer sans risque au white spirit quitte à re-lubrifier les pièces mobiles. Attention si vous utilisez de l’Acétone. Certaines matières synthétiques n’apprécient pas du tout.

Concernant les contacteurs, il existe une panoplie de produits en aérosol (style bombe Kontact) qui permettent à la fois de nettoyer et améliorer la qualité des contacts électriques.

La restauration de l’électronique est très difficile à faire car les composants actuels sont différents des composants anciens :

Comme on le voit, la restauration de la partie électronique visant à conserver la technologie d’origine sera difficile à faire sans adopter de compromis. Dans ce cas, pourquoi le faire, surtout si le poste n’est pas destiné à être utilisé.

Conseil : si vous ne réparez pas l’électronique, retirez le fusible du transformateur et laissez un document dans le poste précisant sont état avec comme consigne, « ne pas rebrancher, l’électronique n’est pas en état de marche et peut provoquer des dommages » ou quelque chose de ce style afin qu’un de vos successeur n’aille pas imaginer que le poste (normalement de bel aspect puisque restauré) a également été réparé.

La réparation et ses limites

Si vous souhaitez un poste fonctionnel, il est probable que vous devrez sacrifier des principes de la restauration ne serait-ce qu’à cause du changement de certains composants. Pour un usage quotidien du poste, vous devrez changer les condensateurs chimiques, les condensateurs papier et les résistances agglomérées lorsqu’il y en a.

Vous ne devrez évidemment pas transformer la partie active de l’électronique (tubes à vide) puisque le principal intérêt est de bénéficier de la couleur du son de ce type de montage. Vous pourrez néanmoins envisager la modification du redressement, en particulier pour les redresseurs au sélénium qui, moyennant une adaptation, pourra être remplacée par des redresseurs au silicium. L’adaptation consiste à rajouter une résistance de puissance en série afin de compenser la quasi absence de résistance interne des diodes au silicium. Il faudra aussi peut-être améliorer le filtrage pour limiter l’effet des pics de commutation de ces diodes.

Dans certains cas, vous pourrez remplacer les lampes d’éclairage à incandescence par des équivalents à LED. Le problème des équivalents à LED est leur directivité importante ce qui dans certains cas oblige à multiplier les LED pour retrouver une uniformité de l’éclairage du cadran ou des enjoliveurs.

Dans certains cas, vous pourrez également remplacer les haut-parleurs par des modèles modernes mais une étude du schéma du poste sera nécessaire pour trouver le bon montage équivalent (il peut exister des problèmes d’impédance et de technologie).

Ce site propose plusieurs méthodes de dépannage (art du dépannage de Lucien Chrétien, cours d’Eurelec, mes propres conseils) qui vous aideront à réparer l’électronique d’origine.

Transformation des postes

Lorsque l’on récupère un poste massacré et en partie cannibalisé, un moyen de le remettre en fonction est d’y intégrer une électronique « moderne » (j’utilise des électroniques d’autoradio des années 1970-1980). Vous trouverez quelques exemples sur ce site.

imgLa principale difficulté est de faire les liaisons mécaniques entre les commandes du poste (volume, stations…) avec l’autoradio.

Si le poste disposait d’un œil magique, sachez qu’il est possible d’en émuler un à l’aide d’un afficheur à cristaux liquides et d’un microcontrôleur pour quelques dizaines d’euros.

Avec un tel poste transformé, vous pourrez écouter les bandes en modulation de fréquence (en remplacement des ondes courtes par exemple). Par contre, le son sera celui d’un poste à transistors.

Une autre possibilité est d'utiliser un module FM que l'on trouvait pour quelques euros en 2016. Selon l'état du poste, vous pourrez brancher les sorties de ce modules sur l'entrée pick-up de votre poste et ainsi, utiliser l'amplificateur à lampe. Si le poste est complètement HS, vous pourrez ajouter un amplificateur classe D (quelques euros) qui commandera un haut-parleur moderne et une alimentation basse tension.